
Il fait encore nuit, l’air est doux, mais je ne trouve pas le sommeil. À mes côtés, une silhouette étendue. D’ici quelques heures, elle se tournera vers moi et ce sera le matin. Je donnerai l’illusion que je dors à poings fermés. Mensonge. Comme souvent, lorsque l’on dort ensemble, il commencera par me caresser. Doucement d’abord, puis, avec de plus en plus d’insistance. Je sentirai alors sa virilité de plus en plus grande, de plus en plus gonflée à la simple idée de faire de moi son objet de désir. Pourtant, je ne ressens pas les mêmes envies ce matin. Après cette mauvaise nuit, la perspective de flâner dans le lit et de faire la grasse matinée règne en maître dans mon esprit. Comme souvent, il ne me demandera pas mon avis. Et je ne me risquerai pas à le contrarier. La dernière fois que je me suis refusée à lui, j’ai eu droit à la remise en question de mon amour envers lui ainsi qu’à une multitude de reproches sur mon manque d’implication dans notre vie de jeune couple. Comme souvent, je repenserai aux paroles de ma maman qui me disait : « tu sais ma puce, viendront des moments où tu n’en auras pas envie, mais où il faudra quand même te forcer pour satisfaire ton partenaire ». Mensonge. C’est ce que je pense au fond de moi. Malgré cela, si je ne le satisfais pas ce matin, il menacera de partir, de me laisser en promettant que je n’aurai plus jamais la chance d’être aimée de la sorte et que je ne trouverai jamais mieux. J’y ai cru. Foutu mensonge. Tout se chamboule dans ma tête, la pression sociale qui présente le couple comme un aboutissement et méprise le statut de célibat le traitant comme un moment charnière et passager de la vie, le regard de ma famille sur le contenu de ma vie amoureuse, les commentaires de mes ami.e.s sur l’image de mon couple… Comme souvent, j’ai choisi le silence. Une fois de plus. « L’appétit vient en mangeant », n’est-ce pas maman? Comme trop souvent, je n’aurai qu’à penser à autre chose, cela passera plus vite et tout le monde en sortira gagnant. Mon couple sera sauf et j’éviterai une dispute de plus.
Texte : Céline Gonzalez Gonzalez
Image : Kriss Mrx